mercredi 13 octobre 2010

Victoire 2012 -Acte I, scène I


PROLÉGOMÈNES
 
France, Septembre 2012.
Voici 5 mois que la Première Présidente de la VIème République Française a pris ses fonctions, après une élection triomphale, et suite à une conjugaison de facteurs tous plus incroyables les uns que les autres. 

Les faillites du gouvernement précédent -suite au bilan désastreux du président Sarkozy- ainsi que  du parti majoritaire UMP qui s'est littéralement entre-déchiré à l'approche des élections, ont été largement consommées

L'opposition ne fit pas mieux : lors de ce que la presse appela par la suite un "Congrès de Rennes bis", les principaux ténors du PS ont chacun tenté de ramener la couverture à soi, par tous les moyens, et aucun consensus n'a pu se dégager...sans parler de l'implosion du PS en une multitude de micropartis. Ce furent pas moins de 4 candidats issus du défunt PS qui se déclarèrent pour le premier tour...

Le maniement des thèses sécuritaires, ensuite. Portée à son paroxysme par l'attitude électoraliste et panicarde d'un gouvernement aux abois, la peur fut patiemment entretenue et développée chez la plupart des français, au fur et à mesure que se rapprochait l'échéance présidentielle. Et ce ne furent pas les rares avertissements en provenance d'intellectuels de la blogosphère, ni même l'accès d'une infime minorité à une information non truquée par le biais d'internet qui changèrent la donne :  la nouvelle Loi Loppsi, entrée en vigueur début 2011, éteignit assez rapidement (et plutôt brutalement) toutes les voix dissidentes.

Rajoutez à cela une Crise économique Majeure, avec un taux de chômage de plus de 18%, des scandales politico-financiers à répétition et une vague d'attentats "terroristes" (dont les coupables ne furent jamais retrouvés), et le pays était mûr...

07 mai 2002 : après une abstention record  de plus de 40% au second tour, la majorité des électeurs de gauche refusant d'avoir à choisir, une nouvelle fois, entre la peste et le choléra, l'impensable se produisit : le petit président, qui avait obtenu 30% au premier tour (contre 27,5 pour Marine), se fit déborder sur sa gauche, et sa droite simultanément. Une bonne partie de ses propres électeurs, furieux de ses multiples mensonges et veuleries, ne se déplaça même pas pour aller voter. 
Marine mobilisa en masse sur sa droite, lui faisant "payer mai 2007" selon ses propres termes, grâce à un adoucissement de son discours sécuritaire et un revival aux accents "gaulliens", sur les "vraies valeurs bafouées de la France éternelle". 
Simultanément, elle rafla les voix de la gauche populaire, sinistrée par la crise et dégoûtée de la médiocrité de l'opposition, avec d'alléchantes promesses de retour au plein emploi "grâce à l'expulsion de la main-d'œuvre immigrée qui vole le pain des français". 

NS 49,5% , MLP 51,5%.



Les dés étaient jetés.
La suite n'est que conjectures.....l'Histoire n'est-elle pas écrite par les vainqueurs?

ce qui importe c'est la comm', pas les idées
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Madame la Présidente de la République s'approcha du balcon et jeta un œil par la fenêtre : au loin ,les lumières de la Capitale rougeoyaient. Les derniers Brasiers finissaient de se consumer doucement. Cette guerre des cités n'en finissait plus! Heureusement, les commandos de marine(sans jeu de mots) et la Légion Étrangère, envoyés hier matin sur les principaux lieux de révolte -pardon, de "terrorisme"- avaient commencé à rétablir l'Ordre Républicain.

Scènes de liesse à l'annonce des résultats
Les hérétiques socialo-communistes du PS/verts, les anarcho-centristes du Modem/NPA ainsi que cette espèce de fange Romano-trotskyste de la vieille garde gaulliste (il en restait encore? il fallait croire que oui, nom d'un chien, au XXIème siècle rendez-vous compte!!), bref tous ceux qui agitaient le pays depuis des mois et incitaient au terrorisme anti-républicain en permanence seraient réduits au néant, cette nuit même. Bien fait pour eux! Ils n'avaient qu'à pas être aussi minables : toutes ces idées de gôôche, et de "démocratie" lui avaient toujours inspiré le plus grand dégoût, en plus d'une furieuse envie de réduction.

Dieu que ces êtres étaient répugnants! Mais pourquoi lui en voulaient-ils autant?  Pouvait-on simplement, au futile prétexte de "manger à sa faim", aux seuls motifs de "pouvoir d'achat décent" et d'"antifascisme", se déclarer "sécessionniste" et partir en guerre contre les structures de l'État? Les mufles -après tout ce qu'elle avait fait pour eux! Et voilà que tout ceci lui avait donné mal à la tête... Elle allait leur faire regretter leur impudence.

On distingue clairement le poing levé: avortons-le!
Réduction -oui, c'était ça LE mot. Les réduire, les avorter, les écraser, pire : les annihiler. Les faire retourner au néant, d'où ils n'auraient jamais dû s'extirper, en fin de compte! Cette dernière pensée lui arracha un sourire de joie : il faudrait qu'elle le note, surtout ne pas oublier l'idée! Elle tira une feuille du bloc négligemment posé sur son secrétaire en acajou (modèle XVIIIème, avec incrustations d'ivoire et d'obsidienne, rehaussé de parures en plumes de castor amérindien, aujourd'hui disparu : il avait coûté une petite fortune!), se saisit de son Mont-blanc édition spéciale "1st woman French Commander in chief" (un incroyable gratte-papier fabriqué exclusivement pour elle, en plaqué laque de Chine,  avec pointe platine et 12 rubis de 0,9 carats sous le capuchon. Ces bridés étaient dégueulasses et stupides, mais question matériaux traditionnels, ils assuraient un max!) et griffonna quelques mots, à la va-vite : Loi d'exception? Réduction du terrorisme? définir termes pour application selon pleins pouvoirs/ voir Maréchal BriceH pour mise en œuvre.

Un rapide coup d'œil à sa Breitling -un modèle fantastique, gravé au laser à ses initiales, avec cadran titane cerclé d'or, rehaussé de 48 diamants et 12 émeraudes, pour un total de 180carats- lui indiqua que le Conseil Extraordinaire de Sécurité Intérieure  allait débuter dans quelques instants. L'irruption du groom EricB dans son cabinet, tête courbée, raie parfaitement au milieu et livrée rouge impeccable, le lui confirma :

-Maîtresse, la séance plénière va débuter! Le Premier Ministre Plénipotentiaire BrunoG vient de m'envoyer vous quérir, Votre Auguste Présence est requise dans la salle du Conseil!

-Bien bien, merci Eric, vous pouvez disposer...hummmm attendez une minute?

Le groom s'immobilisa, tentant de dissimuler avec la plus grande difficulté une grimace de terreur pure sur son faciès de métèque ingrat.
laquais, fais donc le canard
-Ma-Madame? la petite chose bégayait de crainte.
-Non, rien...n'oubliez pas de mettre votre livrée verte la prochaine fois, nous sommes Vendredi, non? une pointe d'irritation perçait dans sa voix haut perchée. Pas bon ça, devait-il se dire, tandis qu'une sueur rance dégoulinait de son front et allait tacher son petit veston.
-ou-oui madame, je n'y manquerai pas, veu-veuillez m'exc/ -c'est bon c'est bon, dégagez! elle le congédia d'un geste impérieux, la main en extension vers la porte. Le petit cancrelat partit à reculons. Non, vola littéralement vers la sortie, pour être plus exact.


Il faudra que je me penche sur son cas...plus tard. Elle allait arracher une nouvelle feuille de vélin de Madagascar de son porte-documents Mazzuoli ultra design (by John Starck, édition spéciale Élysée, modèle ébène et argent, une merveille!) , afin d'y noter ses observations sur les cafards, lorsque papa entra brutalement dans la pièce, éparpillant les feuilles de notes aux quatre vents et faisant s'envoler les dossiers de déport négligemment posés sur son bureau.

-Marine! Il faut que je te parle!
 -Papaaaa...on dit 'Madame la Présidente', combien de fois devrais-je te le dire!? le sermonna-t-elle gentiment.

 Papa était si fier de fifille. De sa réussite, là où il avait toujours échoué. Il ne le lui avait jamais avoué, mais il regrettait amèrement de n'être pas né trente ans plus tard : il aurait pu profiter de cette formidable époque qui vit son parti chéri, son enfant, son bébé accéder au pouvoir suprême...

-"Marine!" Sa main gauche tremblait. "Il faut que je te dise..."
-"Plus tard papounet, j'ai un conseil qui débute dans trois minutes, vois avec Eric, prends un rendez-vous..."

Le lifting de 2007 n'aura pas marché ..
Ce vieux gâteux l'agaçait prodigieusement. Non pas qu'elle niait l'utilité d'avoir un père de cette trempe (après tout il avait fondé l'instrument de son accession au Pouvoir Suprême), mais avec l'âge elle le trouvait... chiant. Oui, c'était ça : gâteux, sénile et chiant. Collant, à mesure que son Parkinson évoluait, ses vieilles lubies reprenaient le dessus. Combien de fois avait-elle dû couvrir ses agissements? Telle sombre affaire de ratonnade qui lui revenait en mémoire... Non, décidément, tout ceci n'était pas bon. Pour les affaires électorales, s'entend. Elle avait d'autres méthodes.
Des 'trucs plus soft', aurait dit son Ministre de la Sécurité Intérieure Bruno Mégret. (un bon élément, celui-là)
'Des choses plus électoralement compatibles' aurait précisé ce grand mou de Bruno Gollnisch, chargé de l'Intégration et de l'Identité Nationales. (il fallait qu'elle s'en méfie de celui-ci...)

Elle le repoussa de côté, il protesta mollement avant de s'affaler sur le canapé du petit salon.
-"Marriiinnneuhh'... couina-t-il, son petit bandeau tressautant sur son orbite... Pleurait-il? Elle s'en moquait à vrai dire. Ça lui passerait!

Elle sortit rapidement de la pièce, passa devant les 4 plantons de sa Garde Rapprochée qui se mirent au garde à vous dans un bel ensemble. (de beaux gosses, grands, forts, si ...Français de souche) Leurs treillis couleur camouflage et leurs chemises brunes  impeccablement repassés, leurs rangers cirées de frais luisantes dans la pénombre, le doigt sur la gâchette du 357 chromé, la matraque au côté.... ils étaient magnifiques, le top, la classe!
Marine 2012 : y'à bon
Elle parcourut rapidement le couloir lambrissé, les murs tapissés d'affiches Banania 'ancienne époque' lui renvoyaient une lumière tamisée, moins dure qu'à l'accoutumée, et la mirent d'humeur joyeuse... lui rappelant ses objectifs.

Elle franchit la porte de la salle du Conseil en trombe : les 13 ministres se levèrent dans un ensemble impeccable.

-"Messieurs-Dames "... fit-elle d'une voix forte.

Elle tira une chaise.

Le Conseil de Sécurité Intérieure Extraordinaire allait commencer.

7 commentaires:

  1. Magnifiquement.... flippant !!! (parce que scénario crédible)
    J'applaudirais bien mais je crois que Jean-François Pinochet, le ministre de la torture légale dans un cadre républicain, vient de me trancher les deux mains...

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  2. merrrki ^^... c'est vrai que je me suis fait violence pour écrire un scénario 'réaliste' dans la mesure du possible, et ne pas tomber dans la caricature à outrance (ou si peu), bien que ce n'est pas l'envie qui m'en manque! C'est tellement plus facile de se fiche de leur gueule que d'admettre que, si nous continuons sur cette lancée, il y a un risque certain que ça arrive... le pire c'est que c'est peut-être la seule chose qui me fait vraiment peur, en ce moment... la renaissance de la bête immonde, quelque part en france ou en europe. Et son accession au pouvoir. Et ce qui ira nécessairement avec. J'en ai peur parce que je le ressens, en ce moment, et de plus en plus....
    c'est quelque chose qui est dans l'air. Et nos "politiques" feraient bien de s'en méfier, car c'est leur incurie qui risque de précipiter ce genre de chose.

    Après, pour la description du conseil des ministres, c'est prévu, ce sera le prochain billet (quand j'aurai le temps, parce qu'en ce moment bouuuhhh...)

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  3. hier, sur France 2, c'était surréaliste... un plateau que de filles... que dis-je ? de femmes politiques, interviewées par Une Journaliste : Martine Aubry, Rama Yade, Cécile Duflot, et en duplex ta copine... Marine Le Pen. Franchement, dans le lot, il n'y en a qu'une qui a fait figure honorable : Aubry. Parce que les autres... c'était de la gnognote !!! Aubry l'a dit d'ailleurs : "Marine le Pen au second tour ? ça voudrait dire que Sarkozy a réussi son travail de sape ! et ça, on ne peut pas croire que ça soit possible."

    Ce qui m'a moyennement fait sourire c'est de voir Rama Yade (défendant les thèses lepénistes, dire qu'il ne fallait quand même pas la comparer à Marine Le Pen).

    Oui, Messieurs, être femme ne veut pas forcément dire être suprêmement intelligente, et ne croyez pas (comme Duhamel) que votre argument que les femmes aussi sont connes... nous empêchera de vouloir prendre les rennes ("vous" en êtes encore à croire que "puisque les femmes ne sont pas plus intelligentes, elles n'ont rien à apporter de plus, donc, qu'elles restent à leur place, i.e. en dehors de la notre sphère politique"). Car, que certaines soient connes n'empêchent pas celles qui ne le sont pas d'apporter des idées et des façons de faire nouvelles (n'en déplaise à Duhamel ou à Sylvie-Pierre Brossolette, qui s'est fait rajouter le "Pierre" histoire de...). Que certaine(s) soient immondes ne change pas grand chose à l'affaire... de l'immondice, comme si Marine Le Pen était plus horrible que son père... comme si la monstruosité s'amplifiait en devenant féminine... Même là, Messieurs, accordez-nous l'égalité.

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  4. Bon allez, on est trois dans la résistance.
    Je paie la première tournée.
    Luciamel, il n'y a aucun problème pour les femmes (enfin pour moi et ce que j'ai lu de ce billet), la connerie n'a pas de sexe (mais il faut toutefois reconnaitre que les hommes en ont été sacrément l'étendard et le porte-drapeau, le long des siècles)

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  5. J'adore la politique fiction. C'est salutaire. Ca marche dans les deux sens, on peut aussi réinventer le passé. Il paraît qu'on appelle ça l'uchronie. Alors bravo. Si c'est encore en ligne, je le lirai demain.

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  6. arf Lucia : tu me poignardes! MA copine?...mettons que je n'aie rien lu....pour le reste je ne peux être que d'accord avec toi : je n'ai pas vu le débat dont tu parles (je crois que ça m'aurait énervé, en plus j'avais mieux à faire je tapais le boeuf chez des potes ^^) mais j'ai un avis là dessus! >>les femmes ont totalement pris le pouvoir (ou sont en passe de le faire) sur les misérables métrosexuels que nous sommes devenus, y compris en politique....la connerie ne s'arrêtera jamais à la différenciation sexuelle :mais il faut dire que les Yade, Morano, Ségo, Aubry et consorts me fascinent bien plus qu'un fade kouchner, ou un jaunâtre Besson (là je suis méchant pour les chinois)

    Cher mike, franco(hum) si ce scénario de 2012 se produisait, que ferions-nous vraiment? Se poser la question n'implique pas forcément d'y répondre direct : qui peut affirmer qu'en 40 il aurait été résistant, et pas collabo? certainement pas moi (la situation était complexe impliquait souvent plusieurs personnes, des familles entières). Ce que je sais c'est qu'à l'heure d'aujourd'hui je suis en accord avec moi-même pour dire que ça crait (c'est déjà un progrès de constater ce néant qui avance),et j'arrive à me placer dans un camp, je résiste plus ou moins bien, j'essaie de ne pas trop flipper (pour ce que ça change) et de traduire ces impressions en écriture. Mais je ne suis qu'un moucheron! car aux saloperies qui surviendront demain, va savoir ce que je ferais? la chair est faible...

    salut Mtislav, j'aime beaucoup les uchronies, il y avait notamment ce bouquin de K.Dick 'Le Maitre du haut chateau' une merveille pas si éloignée de nos préoccupations actuelles ...mais dans l'autre sens! à lire si tu ne l'as pas déjà fait. En tout cas merci pour ta visite ici, promis j'essaierai de balancer ce conseil des ministres le plus tôt possible mais il va falloir que je fasse de sérieuses et longues recherches pour que ce soit cohérent (donc couteuses en temps, la denrée dont je manque actuellement) -décidément sans prétention c'est de moins en moins un blog, et de plus en plus un recueil de mini nouvelles j'ai jamais pu m'en empêcher dis c'est quoi un billet court?

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  7. Ce qui m'a le plus surpris dans ce billet, c'est de découvrir que Mégret était encore de ce monde.

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merci de poster ici vos irrévérencieux commentaires. Tout ce qui est révérencieux ne sera pas accepté, ainsi que tout ce qui est contraire aux valeurs de ce blog en général (allez, on va dire : "Valeurs Humanistes"). Après, pour le reste, j'adoooore polémiquer... (NB : les commentaires anonymes ne sont pas acceptés, prenez au moins un pseudo quoi!)